Inspiré en retraite

Qu'est-ce que les monastères ont à gagner à ce qu'une poignée d'étudiantes et d'étudiants viennent jeter un coup d'œil derrière leurs murs, perturbent leur retraite, posent des questions curieuses et qu'il en ressorte finalement non pas de l'esprit, mais de la matière ? Eh bien, l'irruption du monde dans le monastère n'était pas non plus étrangère à Benoît. L'hospitalité est un élément essentiel de la culture bénédictine, même si elle n'a pas été conçue comme une distraction agréable pour les moines, mais comme un exercice de la vertu chrétienne fondamentale d'ouverture envers ceux qui cherchent et qui n'ont pas de patrie.
Les étudiants de la Hochschule für Angewandte Wissenschaft und Kunst de Hildesheim (HAWK), qui sont partis à la découverte de différents monastères dans le cadre d'un séminaire sur la culture monastique dans le contexte du design au semestre d'hiver 2014/15, ont également bénéficié de l'hospitalité monastique. Leur objectif était de transformer plus tard leurs expériences dans ce monde monastique étranger et inhabituel en projets de design. Manufactum et KLOSTERLAND e.V. les ont soutenus dans cette démarche, tant au niveau du contenu que de la pratique. Les rapports et les projets ont finalement trouvé leur place dans ce livre.
Lorsqu'on lit les rapports de monastères dans ce volume, on est tout d'abord frappé par cette ouverture mutuelle : l'impartialité juvénile, voire l'ambiance positive, de la part des gens du monde dans leur approche des monastères respectifs, qui à leur tour partagent volontiers non seulement des faits, mais aussi leur propre histoire de vie. C'est toujours dans le contact personnel que l'expérience monastique brille le plus, bien plus que dans une littérature intelligente mais trop souvent idéaliste. Et puis il y a l'espace expérimental du monastère, qui s'étend sur cet horizon depuis 1400 ans. La vie monastique n'est pas seulement un parcours personnel de plusieurs dizaines de milliers de personnes, mais aussi une recherche représentative de modèles de vie alternatifs. L'horizon d'expérience et l'espace expérimental du monastère étaient donc les conditions idéales pour que les jeunes créateurs des disciplines les plus diverses trouvent leur inspiration dans un système de signes étranger. Car il est certain que le mur du monastère est aujourd'hui, dans les faits mais aussi virtuellement, beaucoup plus perméable qu'à l'époque de Benoît. Mais il n'est toujours pas un vestige purement muséal, car celui qui lit attentivement les rapports découvre entre les lignes une distance critique par rapport au monde. Autant Goethe avait raison de dire que l'on ne voit que ce que l'on connaît déjà, autant il est vrai, à l'inverse, que c'est justement l'étranger qui peut déclencher un processus de perception fort si l'on s'en approche consciemment. Il s'agit de s'attendre à l'inattendu. Les étudiants étaient très motivés pour s'exprimer sur leur propre terrain avec la réserve d'idées et de formes qu'ils avaient acquises. Les projets de création qui ont vu le jour montrent dans la deuxième partie de ce livre l'étendue des expériences tout à fait similaires - toutes ont été faites dans des monastères bénédictins - qui peuvent être mises en œuvre sur le plan du contenu et de la forme. Ils illustrent la force d'inspiration qui s'ouvre au-delà du mur, dans la clôture, à celui qui franchit avec la bonne ouverture d'esprit la porte vers l'étranger Klosterland.